Créer une armée

C’est le 26 juin 1940 que le général de Gaulle annonce à la presse britannique la création des Forces françaises libres (FFL). Dans la construction de ce proto-Etat que de Gaulle projetait de bâtir avec la France libre, l’existence d’une armée était vitale, d’autant plus que la poursuite des combats aux côtés des alliés britanniques était la raison d’être de son Appel. Cette armée se constitue peu à peu autour d’un noyau central de volontaires qui acceptent de rompre avec l’ordre légal représenté par Pétain pour se rassembler autour du général de Gaulle.

La 13e demi-brigade de Légion étrangère (13e DBLE) fait partie de ce noyau initial autour duquel les Français libres se sont agrégés progressivement, au fil des engagements, individuels ou collectifs. De retour de Norvège, où elle s’était illustrée face à l’armée allemande, en mai 1940, la 13 DBLE avait été envoyée en Bretagne, à la

 

 mi-juin, former un réduit breton face à l’invasion allemande. Prise dans la débâcle, elle parvenait néanmoins à rembarquer et rejoignait l’Écosse le 21 juin, où elle retrouvait d’autres unités du corps expéditionnaire de Norvège dans la région de Trentham Park. Les rescapés de la demi-brigade n’ont pas entendu l’appel du 18 juin : ils n’en entendent parler que les jours suivants. Dès le 22 juin, la BBC annonce prématurément son ralliement à la France libre. En réalité, sur les 1619 légionnaires présents le 28 juin, un peu moins de 900 rallient la France libre, les autres rejoignant le Maroc. La quasi-totalité des cadres des autres unités du corps expéditionnaire français en Norvège choisit le retour en France ; seuls, la section de chars légers et 60 chasseurs alpins, dont 31 volontaires du 6e bataillo

 

n de chasseurs alpins sur un effectif d’environ 700 hommes, restent en Grande-Bretagne.

Les officiers ayant choisi de s’engager dans la France libre ont été peu nombreux. Citons, parmi les premiers à l’avoir fait, le capitaine Koenig, chef d’état-major de la 13e DBLE, Dewavrin, futur Passy, le colonel de Larminat, chef d’état-major des forces du Levant ou encore le capitaine Philippe de Hauteclocque, qui choisit de s’engager sous le nom de Leclerc, ayant laissé sa femme et leurs six enfants en France.

Parmi les plus hauts gradés, les généraux Legentilhomme et Catroux font eux aussi figure d’exception, de même que l’amiral Muselier. Les premiers ralliés, embryon des FFL, sont donc généralement des isolés : le capitaine Jourdier qui, avec le 1er escadron du 1er régiment de marche des spahis marocains, quitta la Syrie pour rejoindre la Palestine et rallier la France libre fait donc figure d’exception.

En revanche, des centaines de volontaires traversent la Manche comme ces 110 élèves de l’école de pilotage du Mans, commandés par le lieutenant de réserve d’aviation Pinot, ancien combattant de la Grande Guerre, qui partent le soir du 18 juin 1940 de Douarnenez à bord du langoustier Trébouliste en direction de Falmouth. 

Baptiste Léon, avec la relecture amicale et attentive de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, dossier pédagogique réalisé pour le 70e anniversaire de l’Appel du 18 juin 1940, 2010.

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