Michel Boivin, Histoire du gaullisme en Basse-Normandie.

Tome 1 : Le gaullisme de résistance et de libération (18 juin 1940-20 janvier 1946),

Marigny, Editions Eurocibles, 2020, 264 p.

Le premier des quatre tomes de l’histoire du gaullisme en Basse-Normandie de 1940 à 2002 analyse en détail l’évolution du gaullisme de résistance et de libération, du 18 juin 1940 au 20 janvier 1946, et montre une région bas-normande adhérant au gaullisme précocement, activement, diversement et massivement au point de devenir la région métropolitaine la plus favorable à ce courant de pensée et d’action indissociable de l’aventure extraordinaire d’un chef exceptionnel. Dès le 18 juin 1940 et les jours suivants, l’appel est entendu et plusieurs dizaines de très jeunes Bas-Normands, issus pour la plupart de milieux populaires, rejoignent Londres par la mer. L’écoute facile de Radio-Londres, le signalement répété de l’appel dans la presse locale et sa reproduction intensive sur des tracts manuscrits déposés dans les boîtes aux lettres en ville comme à la campagne assurent un porter à connaissance rapide et étendu.

Après cette brève phase de découverte et d’imprégnation s’ensuit une montée en puissance rapide du gaullisme de résistance. Les mots d’ordre de Londres donnent naissance à une résistance civile ouvertement gaulliste. Durant l’été 1940, des groupes locaux de résistance d’obédience gaulliste s’organisent en divers endroits de la région et passent à l’action contre l’armée d’occupation par des sabotages de son matériel et contre Vichy par la lacération de ses affiches officielles. Du printemps à l’automne 1941, la bataille des V ornés d’une croix de Lorraine est un véritable défi à l’autorité allemande comme à l’autorité de Vichy. En 1942-1943, l’influence grandissante du général de Gaulle en Basse-Normandie se traduit par un nouveau culte gaulliste, de nombreuses tentatives risquées pour rejoindre les FFL via l’Espagne, une amplification de la propagande gaulliste et un essor de la résistance sous la forme de mouvements et de réseaux en lien avec Londres.

Rien d’étonnant donc à ce que les Bas-Normands soient derrière le général de Gaulle à la Libération. Les premiers d’entre eux libérés jouent d’ailleurs un rôle tout à fait déterminant, le 14 juin 1944, à Bayeux, en plébiscitant le président du GPRF effectuant son Débarquement dans la plus grande improvisation. Au cours des semaines suivantes, les Bas-Normands soutiennent à l’unisson la nouvelle administration gaulliste aux prises avec les multiples provocations des autorités américaines tentées par l’AMGOT. Lorsque le général de Gaulle redonne la parole au peuple, le 21 octobre 1945, pour établir une République nouvelle et élire une Assemblée constituante à pouvoirs limités, les Bas-Normands répondent par un double Oui record à l’échelle de la métropole.

Les dossiers de la police et de la gendarmerie plus que les rapports de préfet et les saisies du contrôle postal, les procès de l’épuration et les délibérations des assemblées municipales et départementales plus que la propagande de l’armée américaine et les papiers de reporters d’un jour permettent d’observer et d’interpréter un esprit de résistance gaulliste éminemment populaire dès le printemps 1941 et s’exprimant dans une région densément occupée, à dominante rurale, agricole, catholique et conservatrice, et éprise d’ordre, de liberté, d’honneur et de patrie.

X