CE QUE LE LIBAN PEUT APPRENDRE DU GÉNÉRAL DE GAULLE

par Karim Émile Bitar

 

Karim Émile Bitar est professeur associé à l’Université Saint Joseph de Beyrouth, directeur de recherche à l’IRIS, directeur de la revue L’ENA hors les murs, co-directeur de l’ouvrage Le Cèdre et le Chêne.

« Ce qui caractérise une intelligence de premier ordre, c’est son aptitude à garder simultanément à l’esprit deux idées contradictoires sans pour autant perdre sa capacité à fonctionner. On devrait, par exemple, être capable de voir que les choses sont sans espoir et pourtant être déterminé à les changer. »
Francis Scott Fitzgerald [1]

 

Francis Scott Fitzgerald ne fait pas partie des écrivains ayant exercé la plus grande influence sur le général de Gaulle. Parmi ceux-ci, on trouve surtout Chateaubriand, Barrès et Péguy. [2] Pourtant, cette belle phrase de Fitzgerald semble résumer parfaitement un certain état d’esprit qui fut celui du général de Gaulle tout au long de sa vie, et plus particulièrement le 18 juin 1940, jour où la vie du général s’est transformée en destin. On retrouve ce même état d’esprit, que l’on pourrait qualifier de « mélancolie proactive », chez une autre figure légendaire, celle d’Abraham Lincoln qui s’était lui aussi efforcé de concilier le pessimisme de la raison et l’optimisme de la volonté, selon l’heureuse formule qu’Antonio Gramsci a empruntée à Romain Rolland. La première leçon que les Libanais qui se penchent sur la vie, le tempérament et la pensée du général de Gaulle, doivent retenir est précisément celle-ci : le refus de la résignation, le courage de reprendre le collier même lorsque tout semble perdu, l’idée que le désespoir est interdit, quand bien même tous les éléments objectifs seraient susceptibles de nous y conduire.

Transcender les blessures dans l’action

C’est ensuite la volonté de transcender la souffrance et les blessures, aussi bien intimes que nationales, et de les canaliser dans une action constructive de longue haleine. Oui, il est important d’évoquer les blessures, les fêlures, les meurtrissures, car de Gaulle comme Lincoln étaient loin d’être des personnages ayant la solidité d’un roc et que rien ne pouvait atteindre. Ils étaient au contraire, à bien des égards, des personnages tourmentés, ils avaient souvent l’âme sombre et se retrouvaient aux prises avec le soleil noir de la mélancolie [3]. Le Charles de Gaulle intime [4] était un homme dont la vie fut marquée par de nombreuses épreuves personnelles et familiales, par des deuils, des exils, des maladies, des angoisses, des tentations de tout abandonner et même de lâcher prise [5]. Et pourtant cet homme cérébral et angoissé a profondément marqué l’histoire du vingtième siècle. Parce qu’il a réussi, comme Lincoln, à transformer la mélancolie en ce qu’André Gide appelait « cette tristesse active et résolue qui précipite l’homme aux actions les plus glorieuses. »

Cet angle-là, celui du « pessimisme actif » et de la souffrance transcendée mérite d’être médité dans un Liban aujourd’hui en proie au doute, saisi tout entier par des angoisses existentielles, par la disparition progressive de tout ce qui faisait son charme, sa grandeur et sa raison d’être. Ces hantises sont aujourd’hui en passe d’hypothéquer l’avenir du Liban lui-même. Les Libanais sont tétanisés par une série de peurs qui les empêchent d’envisager sereinement l’avenir. Blocages politiques et institutionnels, crise économique, déstabilisation régionale et remise en cause des frontières de plusieurs États de la région : rarement le mot de « crise existentielle » n’aura autant pris son sens. Et cette crise ne peut être surmontée sans un volontarisme gaullien [6], sans un sursaut collectif, sans un grand dessein susceptible de redonner au Liban des raisons de croire encore en son avenir. 

Dire non : la noblesse du refus

Mais la première étape avant le sursaut, c’est celle qui consiste à dire non, ce non qui résume toute la geste gaullienne. Les Libanais ont trop rarement su dire non. Non au féodalisme, au clientélisme, à la corruption, aux recroquevillements communautaires. Bien trop souvent, l’attitude prédominante consiste à accepter les compromissions, à laisser faire et à laisse passer, à accepter passivement de graves atteintes à la dignité nationale et à la dignité de chaque citoyen.

De Gaulle fut d’abord et avant tout l’homme qui a dit non, le rebelle, pour reprendre l’expression la plus fréquemment utilisée à son sujet [7]. Le 18 juin 1940, il a su dire non à l’idée d’une France vaincue, non à la résignation, non à toutes les velléités de plier l’échine et de s’engager dans la voie de la collaboration. Quelques hommes au Liban ont tenté de dire non aux abandons de souveraineté, non à la violence, non aux milices, non aux occupations étrangères. Ils ont pour la plupart été contraints à la marginalisation, à l’exil, sinon l’objet de tentatives d’assassinats. Ils ont été perçus et dépeints comme manquant de réalisme ou trop intransigeants. Le général de Gaulle a quant à lui affronté les mêmes obstacles mais il a finalement réussi son pari. « L’homme raisonnable s’adapte au monde, l’homme déraisonnable adapte le monde à lui-même. Tout le progrès est dû à l’homme déraisonnable » disait fort justement George Bernard Shaw. Il faut parfois savoir se montrer « déraisonnable » aux yeux des masses quand on souhaite dire non aux lâchetés et aux compromissions. Il y avait de l’Antigone dans la figure du général de Gaulle. Il y avait aussi une part de bluff, mais c’est ce bluff magistral qui a permis à la France d’être assise à la table des vainqueurs en 1945, c’est un bluff qui restera pour les siècles des siècles comme l’exemple de ce qu’il est possible de faire pour transformer et façonner les réalités empiriques, pour survivre au rouleau compresseur cherchant à briser tout esprit de résistance. C’est trop souvent au nom d’un réalisme mal compris que les Libanais se résignent, convaincus que tout effort est vain, que la situation est désespérante et désespérée, que seuls quelques Don Quichotte ou quelques exaltés croient encore aux possibilités de changement. L’histoire de France au XXème siècle et plus particulièrement celle du général de Gaulle sont pourtant un exemple éclatant que le pire n’est jamais certain, que la magie du verbe et la noblesse du refus peuvent se transformer en victoire, que la mort annoncée peut se transformer en nouvelle vie, si tant est que l’on ait encore envie de vivre.

Le Liban a besoin d’un État, pas d’un « homme providentiel »

Le Liban d’aujourd’hui ne vit plus, il survit, il va de compromis boiteux en compromis boiteux, il semble soumis à ce qu’André Tardieu appelait « la politique du chien crevé au fil de l’eau ». Sa vie politique est entièrement faite de petitesses et de mesquineries, que Georges Naccache dénonçait déjà il y a plusieurs décennies quand il évoquait « les basses filouteries des cliques au pouvoir ». On est à mille lieux du panache gaullien. Mais le salut, de Gaulle lui-même l’avait compris, dit et répété, ne saurait venir d’un « homme providentiel », mais de l’édification d’un État digne de ce nom. Rien ne serait plus contraire à l’esprit du gaullisme que de voir les Libanais rechercher un « sauveur », un « homme fort », qui viendrait à lui seul guérir tous leurs maux tel un roi thaumaturge et les sortir de leur torpeur. Les hommes de la trempe du général de Gaulle sont des exceptions. La rencontre d’un grand tempérament et d’un grand événement historique fait parfois émerger des « grands hommes ». Mais rien n’est pérenne s’il n’est fondé sur des institutions. Le problème du Liban n’est tant la médiocrité de sa classe politique, pourtant bien réelle, que la faiblesse endémique de son État et de ses institutions. On a vu au cours des vingt dernières années des hommes politiques d’une effarante médiocrité accéder au pouvoir dans plusieurs grandes démocraties occidentales. Les pratiques de ces hommes ont souvent été empreintes de vulgarité, de corruption et de clientélisme. Et pourtant, ces nations n’ont que peu été affectées par le passage au pouvoir d’un personnel politique sans grande envergure. Elles ont traversé cette mauvaise passe grâce à l’édifice institutionnel patiemment construit au fil des ans, grâce à la permanence d’un État qui est le garant de l’intérêt général.

Cet attachement à l’ordre, à l’État, aux institutions, n’empêchait pas le général d’estimer qu’il est des circonstances où l’ordre apparent perd son sens et que par conséquent, « la légitimité passe avant la légalité. » La « légalité » avait en effet été contre la France Libre. Il clarifie : « En temps normal, les institutions, les coutumes assurent l’ordre. Mais l’ordre réel ne peut reposer que sur l’indépendance nationale, les libertés publiques, le bon fonctionnement de la justice, la souveraineté populaire. Il y a des périodes où, même si l’ordre continue de régner, il perd son sens. » Ces réflexions prennent un sens particulier eu égard à l’histoire du Liban dans la seconde moitié du vingtième siècle, où cette dialectique légalité / légitimité s’est souvent posée avec acuité. Au bout du compte, estime le général : « Le critère des critères, c’est l’intérêt du pays, qui doit toujours primer. [8]»

« Pas le droit au laisser-aller »

Charles de Gaulle disait en 1963 : « L’État, qui a pour raison d’être l’intérêt national, n’a pas le droit au laisser-aller. » Le « laisser-aller » est précisément ce qui caractérise l’État libanais depuis l’accession de ce pays à l’indépendance. Bien avant que n’émerge la révolution palestinienne armée qualifiée d’ « État dans l’État », bien avant que ne se renforcent les milices libanaises que l’on qualifiera aussi plus tard d’ « État dans l’État », l’État au Liban s’était montré incapable de résister à des menaces de bien moins grande envergure. Quelques contrebandiers actifs à la frontière libano-syrienne parvenaient à faire plier l’État. Quelques commerçants peu scrupuleux à Beyrouth parvenaient à mettre en échec d’importants projets de réformes dans les domaines de l’économie, de l’industrie, de la santé publique. En 1971, le journaliste Edouard Saab, correspondant du journal Le Monde à Beyrouth et rédacteur en chef de L’Orient-Le Jour parlait d’un « État soumis au joug des trusts et des lobbies. » En 1972, Mounah El-Solh, éminent intellectuel issu d’une grande famille sunnite, se portait candidat aux élections législatives car le gouvernement était disait-il « entièrement contrôlé par les monopoles, par quelques accapareurs et par les intérêts privés. » En 1973, l’une des personnalités les plus charismatiques et les prescientes de la classe politique libanaise, le député Pierre Hélou, tenait une célèbre conférence de presse dans laquelle il accusait les monopoles commerciaux de saboter toutes les tentatives de réformer le pays et de lui permettre de se doter d’une industrie solide pouvant assurer l’avenir de ses fils. Ces protestations contre les faiblesses et les compromissions de l’État ne sont pas rappeler la révolte du général de Gaulle contre la toute-puissance des corporatismes et des puissances d’argent : « Là où l’État devrait régner en maître, il est le plus faible. » s’exclamait-il. Il s’est efforcé durant ses passages au pouvoir de restaurer l’autorité de l’État et de mettre aux pas les féodalités dès qu’elles repointaient leur nez. Quatre décennies plus tard, le Liban continue quant à lui de suffoquer sous le joug de divers monopoles politiques et économiques, et à se plier devant toutes les féodalités.

« Se prosterner devant les féodalités, je ne l’ai jamais admis et je ne l’admettrai jamais »

L’attachement de de Gaulle à l’État et son hostilité aux féodalités furent constant. Il lisait même la crise algérienne sous cet angle. « Quant à l’Algérie, on en est arrivé là où l’on est parce qu’il n’y avait pas d’État ; parce que l’État n’a pas fait à temps l’effort qui s’imposait pour faire évoluer l’Algérie et parce que la féodalité des colons l’a dominé. » [9]

Si des « États dans l’État » ont pu apparaître au Liban, c’est parce qu’il s’agissait plutôt d « États dans un non-État ». Comment un gouvernement incapable de faire respecter la plus mineure des législations sociales pourrait-il tenir tête à des milices armées soutenues par des puissances étrangères ? Le même débat surgit lorsque l’on étudie la situation du Liban durant la première guerre mondiale : l’effroyable famine qui a décimé la population du Mont-Liban était-elle uniquement la conséquence des implacables politiques ottomanes et du jeu des puissances, ou était-elle également la résultante du comportement immoral et de l’esprit de lucre de quelques accapareurs bien libanais ? Ces deux phénomènes sont bien évidemment liés. Et comme souvent à travers l’histoire, ce sont les faiblesses libanaises et l’incapacité libanaise à créer un sentiment national, un sens de l’intérêt public et un patriotisme économique qui ont facilité toutes les manigances des puissances régionales et internationales. Hier comme aujourd’hui, « Il n’est pas possible d’admettre qu’une corporation puisse faire plier la nation et reculer l’État (…) il ne faut jamais privilégier un groupe sur la nation, ni sacrifier l’avenir pour surmonter un embarras du présent [10]. »

Le de Gaulle dont les Libanais ont beaucoup à apprendre n’est pas uniquement celui de 1940, mais aussi celui de 1945, celui qui, avec le Conseil National de la Résistance et le Gouvernement provisoire de la République Française s’est efforcé d’instaurer un modèle social et un système économique fondés sur les grands principes de justice et d’équité. Tout au long de sa vie, de Gaulle eut un sens très aigu de la justice sociale, dont l’absence finit toujours par éroder la démocratie et conduire un pays à sa ruine. Ce qui a bien souvent manqué aux libanais, c’est ce sens de la justice sociale, et ce que George Orwell appelait la Common Decency, la décence ordinaire [11], c’est-à-dire l’honnêteté au sens du Grand Siècle, l’instinct du bien commun et de l’éthique qui est tellement présent chez de Gaulle.

« Sculpter la statue de l’État »

En sortant d’un conseil des ministres en décembre 1962, le général de Gaulle confie à Alain Peyreffite [12] : « Ma tâche essentielle, celle qui commande toutes les affaires dont j’ai reçu la charge – l’Algérie, la décolonisation, le redressement de l’économie et des finances, la force de dissuasion, une politique planétaire – c’est de bâtir l’État. J’ai reçu mandat de bâtir un État qui en soit un. » Il poursuivait : « la mission que m’a donnée le peuple, c’est de sculpter la statue de l’État. (…) Dès que l’État cesse d’être l’arbitre au nom de l’intérêt général, c’est la foire d’empoigne des intérêts particuliers. »

« Sculpter la statue de l’État » : si seulement cette phrase pouvait devenir le leitmotiv libanais. C’est cette attention portée à l’édification des institutions qui a amené le général de Gaulle à avoir une telle estime pour le président Fouad Chéhab, chez qui il a perçu ce sens de l’État et ce désintéressement qui étaient pour lui des valeurs cardinales. Chez les deux hommes, on retrouvait aussi un même attachement à l’importance de la Constitution. La Constitution établie en 1958 à l’initiative du général de Gaulle a offert à la France une remarquable stabilité qui avait précédemment manqué à ce pays ayant eu plus de vingt constitutions différentes depuis la Révolution française. Fouad Chéhab quant à lui, demandait toujours « que dit le livre ? », faisant référence à la Constitution libanaise. Pour chacun des deux hommes, l’État se devait d’être au-dessus des factions, d’échapper aux partis. Les deux hommes ont compris que des réformes étaient nécessaires et urgentes, que les « blocs erratiques d’hier ne peuvent pas avancer. » Pour rompre avec le passé et construire l’avenir, tous deux croyaient aux vertus de la planification. « Le plan, c’est le salut. Il faut créer une mystique du plan. » Le plan était pour de Gaulle le parfait compromis entre le marché et le dirigisme. Il ne s’agissait nullement d’une planification à la soviétique, mais simplement de se doter d’un organe et d’une méthode permettant de prévoir, d’anticiper, de bâtir l’avenir, de sortir des improvisations.  Au Liban, le ministère du plan qui avait existé un bout de temps a aujourd’hui disparu. L’État navigue à vue, sans la moindre analyse prospective ni de coordination sérieuse entre ses différents organes.

« L’État n’est pas une juxtaposition d’intérêts particuliers » 

Dans le meilleur des cas, l’État au Liban joue le rôle d’arbitre qui répartit les parts du gâteau entre les différentes « familles spirituelles » et entre ceux que Chéhab qualifiait de « fromagistes ». Cet État gérant des accommodements entre différents intérêts privés est l’exacte antithèse de ce qu’était la vision gaullienne de l’État. Dans ses Mémoires de guerre, le passage dans lequel de Gaulle revient sur sa décision de créer ENA mérite à ce sujet d’être médité : «Aujourd’hui comme il en fut toujours, c’est à l’État qu’il incombe de bâtir la puissance nationale. Je vois en l’État, non point comme il l’était hier et comme certains voudraient qu’il le redevienne, une juxtaposition d’intérêts particuliers d’où ne peuvent sortir jamais que de faibles compromis, mais bien une institution de décision, d’action, d’ambition, n’exprimant et ne servant que l’intérêt national. Pour concevoir et pour décider, il lui faut des pouvoirs ayant à leur tête un arbitre qualifié. Pour exécuter, il lui faut des serviteurs recrutés et formés de manière à constituer un corps valable et homogène dans tout l’ensemble de la fonction publique. L’objectif de remplir cette condition me conduit à créer l’École nationale d’administration, et j’ai eu la satisfaction de l’inaugurer le 13 décembre 1945. » En fin connaisseur de l’histoire de France, le général de Gaulle avait réalisé que ce n’est que par et autour de l’État que la nation française s’était construite. Et que toute déconfiture de l’État ne pouvait qu’entraîner la nation à sa perte. Primum omnium salus patriae (avant tout le salut de la patrie) disait-il souvent à Alain Peyreffite. Mais si l’État doit être entouré d’un halo, les serviteurs de l’État doivent quant à eux faire preuve de la plus grande modestie. « Autant le général exalte l’État, autant il s’acharne à rabaisser l’orgueil de ses serviteurs », rappelle Peyreffite. Au Liban, la vanité et la suffisance de certains hauts fonctionnaires sont parfois inversement proportionnels à l’efficacité et à l’impartialité de l’État.

Une indépendance fière et altière vis-à-vis des idéologies, des intérêts et des grandes puissances

« La politique de la France ne se fait pas à la corbeille » dit également le général de Gaulle en 1966, refusant toute soumission de l’Etat aux puissances d’argent, aux intérêts privés ou aux boursicoteurs. Là encore, la formule fait mouche et sonne encore plus cruellement dans un Liban où la politique s’est toujours faite à la corbeille. Influencé par les écrits de Péguy, de Gaulle disait notamment à propos de l’argent : « Je n’aime pas les communistes parce qu’ils sont communistes, je n’aime pas les socialistes parce qu’ils ne sont pas socialistes, et je n’aime pas les miens parce qu’ils aiment trop l’argent. » Cette boutade est belle parce qu’elle est drôle, parce qu’elle est juste, et parce qu’elle vient résumer la saine méfiance qui fut toujours celle du général de Gaulle par rapport aux idéologies quelles qu’elles soient et par rapport aux féodalités financières [13]. C’est cette magistrale et jamais négociable indépendance qui a permis au général de Gaulle d’attirer à lui de jeunes hommes admirable durant la guerre [14], et plus tard, dans la vie politique, des hommes et des femmes issus de tous les horizons politiques, de droite comme de gauche [15]. Le regretté Philippe Séguin, éminente figure du RPR, écrivait même avoir choisi de s’engager au sein de la famille gaulliste justement parce qu’il voyait en de Gaulle un homme qui transcendait tous ces clivages.

Séguin confie [16] : « Je n’étais pas de droite. J’ai fait un choix politique majeur, il y a quelques décennies. J’ai choisi, précisément, de Gaulle parce qu’il refusait ces clivages. Je l’ai choisi parce qu’il incarnait, – comme Mendès France, à sa façon – une certaine manière de concevoir l’action publique. Je l’ai choisi parce qu’il refusait déterminismes et pesanteurs sociologiques et qu’il plaçait la politique au-dessus de tout. Je l’ai choisi parce qu’il avait lui-même choisi la Démocratie et la République.» En effet, les historiens de la pensée politique rejoignent sur ce point Philippe Séguin, le gaullisme est d’abord une « manière de concevoir l’action publique. » Le général de Gaulle n’était point un doctrinaire et n’a jamais cherché à élaborer de constructions intellectuelles hasardeuses ou de théorie politique holistique. Il fut certes influencé par le catholicisme social et cherchera en lançant l’idée de la « participation » à concilier efficacité économique et justice sociale. Il était tellement attaché à cette idée d’un équilibre entre le capital et le travail que George Pompidou y verra une « marotte » ou même une des « lubies » du général. Mais contrairement à beaucoup d’hommes de son camp, de Gaulle tenait à « trouver une troisième voie entre les loups et les moutons », entre le capitalisme débridé et le collectivisme rigide. « Le marché a du bon, disait-il, il oblige les gens à se dégourdir, il donne une prime aux meilleurs, il encourage à dépasser les autres et à se dépasser soi-même. Mais en même temps, il fabrique des injustices, il installe des monopoles, il favorise les tricheurs. [17]»  Il n’adhérait pas aux théories sur la lutte des classes et voyait dans un État fort et impartial une garantie offerte aux plus défavorisés, à condition toutefois que cet État demeure constamment au-dessus des pressions, des factions et des intérêts catégoriels. Cette modestie épistémologique qui était celle du général, ce refus des théories et doctrines politiques abstraites, qu’elles viennent de la droite ou de la gauche, les Libanais gagneraient à s’en inspirer, eux qui s’enthousiasment parfois si vite et font leur des batailles idéologiques et des guerres de tranchées intellectuelles nées sous d’autres cieux. De Gaulle a toujours réussi à transcender le clivage droite gauche, estimant que « la droite ignore ce qu’est la nécessité de la générosité, et la gauche se refuse à la nécessité de la puissance [18]. » De Gaulle parvenait également, comme le relève Romain Gary, à faire une distinction claire entre le patriotisme, qui est « d’abord l’amour des siens » et le nationalisme, qui est « d’abord la haine des autres. » C’est là aussi une distinction que les Libanais gagneraient à établir plus clairement. Finalement, et c’est peut-être l’essentiel pour cet État tampon qu’a toujours été le Liban, le général de Gaulle considérait que si la France était, dans les années 1960, dans une « situation exceptionnelle », c’est d’abord et surtout « car elle ne dépend de personne. [19] » Il a toujours veillé à ce que l’amitié que la France pouvait avoir, pour des tas de raisons historiques, envers les États-Unis, ne se transforme jamais en suivisme ou en vassalité. Il ne s’est pas privé, dans son discours de Phnom Pen en 1966, de condamner clairement la politique américaine au Vietnam.

Idéalisme et pragmatisme, éthique de conviction et éthique de responsabilité

Autre débat souvent évoqué dans l’historiographie du mouvement gaulliste et intéressant en contexte libanais, celui de la tension et conciliation entre idéalisme et pragmatisme, entre grands principes et réalisme politique. Le général de Gaulle avait été imprégné par la pensée de plusieurs auteurs du courant romantique. C’était l’homme d’un certain idéal. Il croyait, comme Barrès, aux « lieux où souffle l’esprit ». Contrairement aux cyniques et aux réalistes froids, il croyait en la magie du verbe. Pendant de longues années, son seul magistère fut le magistère de la parole. Il croyait aussi à la force de l’écrit, à la capacité d’entraîner l’adhésion en faisant appel à un grand récit national, voire à des mythologies nationales comme celles élaborées naguère par l’historien Jules Michelet. Mais au-delà des grands idéaux, au-delà du romantisme, au-delà de l’homme souhaitant porter un rêve, de Gaulle fut aussi un parfait réaliste, certains ont été jusqu’à voir en lui une dose appuyée de machiavélisme. Il y avait en fait en lui aussi bien une dimension relevant de Kant qu’une autre dimension relevant de Machiavel. Il fut simultanément, et c’est assez rare pour être signalé, un homme d’action et un homme de réflexion. Il croyait en certains grands principes universels et irréfragables. Mais en bon lecteur de Bernanos, de Gaulle était probablement tombé sur cette formule : « les kantiens ont les mains pures, mais ils n’ont pas de main… » Aussi, s’est-il efforcé d’atteindre ses nobles objectifs en sachant souvent faire preuve d’un pragmatisme et d’un réalisme froid. « Le plus difficile, disait-il, est de rester réaliste quand on a un idéal, et de garder son idéal quand on voit les réalités. [20] » Le lyrisme auquel il se laissant parfois aller n’était pas celui d’un exalté. On a prétendu que son ‘Vive le Québec libre’ de 1967 était improvisé, que de Gaulle s’était laissé aller en voyant une foule en liesse. Ce n’est pas le cas. Dès 1963, de Gaulle avait écrit à l’un de ses collaborateurs : « Le Canada français deviendra nécessairement un État et c’est dans cette perspective que nous devons agir [21]. » Peut-être s’est-il trompé là-dessus mais son exclamation de 1967 n’était pas une emportée purement émotionnelle. Mieux qui quiconque, de Gaulle aura réussi à faire se rejoindre les deux éthiques évoquées par Max Weber [22], l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité. C’est tout un art.

Stanley et Inge Hoffmann ont d’ailleurs donné comme titre à leur ouvrage « De Gaulle, un artiste de la politique ». [23] La formule est loin d’être excessive. De Gaulle a façonné lui-même son personnage politique, a usé de tous les ressorts de la dramaturgie pour faire de sa vie elle-même une Magnum Opus. L’étude du rapport à la politique des hommes d’Etat libanais, même chez certaines belles figures, fait plutôt ressortir la roublardise que le talent, le sens de la manœuvre plutôt que celui de la constance, le chemin de la facilité plutôt que celui, ardu et ingrat, qui mène vers la grandeur.

Mais s’il savait se montrer habile tacticien et qu’il était capable de donner des coups assez durs, il avait un sens de l’État qui l’empêchait d’employer tous les moyens à sa disposition. Lorsque, durant la campagne présidentielle de 1965, qui l’opposait à François Mitterrand, qu’il qualifiait d’ « arsouille », son ministre de l’intérieur lui propose de rendre public le compromettant dossier de Mitterrand, et notamment sa proximité avec Pétain et Bousquet, de Gaulle refuse net. Non seulement parce que dit-il, « je ne ferai pas la politique des boules puantes », mais aussi en usant d’un argument plus surprenant : « Il ne faut pas porter atteinte à la fonction, au cas où il viendrait un jour à l’occuper. » Imagine-t-on pareil exemple sous les cieux libanais ? Un homme politique libanais a-t-il jamais épargné délibérément son adversaire afin de ne pas « porter atteinte à la fonction » ?

Le refus de la conception patrimoniale du pouvoir

Aux élections législatives de 2005, un homme politique libanais a déclaré sans rire à L’Orient-Le Jour qu’il était candidat sur la base du programme, sans doute particulièrement audacieux, élaboré par son père en…1937. [24] L’une des caractéristiques les plus affligeantes de la vie politique libanaise est en effet cette conception littéralement patrimoniale de la politique, où l’on voit des politiciens intimement persuadés que tel siège parlementaire ou tel maroquin ministériel appartiennent en propre à leur famille. Une simple comparaison des noms de famille représentés au Parlement dans les années 1930 et aujourd’hui est édifiante. Rien n’était plus étranger au général de Gaulle que cette conception-là. Il avait une sainte horreur des passe-droits et du népotisme. Tant et si bien qu’il fut même accusé de sévérité excessive envers ses propres enfants. Bien que s’étant battu dans les Vosges, son fils Philippe ne sera pas fait compagnon de la libération en 1947 pour couper court au moindre soupçon de favoritisme. De nombreuses anecdotes viennent attester de l’intégrité scrupuleuse du général, de son souci d’établir une muraille d’acier entre les dépenses publiques et les dépenses privées, de ne pas coûter à l’État un sou de plus que ce que n’exige l’exercice de sa fonction.

L’homme de toutes les résistances

De Gaulle fut certes l’homme qui résisté à l’occupation allemande. Mais la résistance ne fut point pour lui une parenthèse historique, mais plutôt l’œuvre de toute une vie. Résistance à toutes les féodalités politiques et financières, résistance à tout ce qui pouvait affaiblir cette France dont il se faisait une si haute idée. Résistance aussi à l’adversité, puisque de Gaulle a toujours tenu tête à tous ceux qui se sont efforcés de lui rendre la vie dure. A posteriori, beaucoup pensent au Liban, et même chez les jeunes en France, qu’un homme de la trempe du général de Gaulle n’a pu que faire l’unanimité autour de lui et être massivement soutenu. Que nenni. Le gaullisme a suscité dès les premiers jours une hostilité viscérale [25] et parfois morbide, qui s’est traduite par des injures, par des peaux de banane, par des moqueries et des sarcasmes, par des traversées du désert et bien sûr par des tentatives d’assassinat trop nombreuses pour être recensées. Dans une lettre à Winston Churchill, le secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères se demandait si de Gaulle ne serait pas un « fou », dont « il faudra s’occuper en conséquence ». Au même moment, des collaborateurs comme Darlan accuseront de Gaulle d’être « aux ordres des anglais », certains communistes le renverront dos à dos avec le maréchal Pétain, l’extrême-droite ne cessera de le vouer aux gémonies, l’extrême-gauche le qualifiera de putschiste et François Mitterrand l’accusera de mener un « coup d’État permanent.» [26] Le tempérament de De Gaulle s’est donc forgé dans l’adversité, et les Libanais doivent prendre conscience que la stature d’un homme d’État ne vient pas, bien au contraire, diminuer les obstacles qui se poseront à son action. A côté de la Résistance avec un grand R, c’est aussi une résistance de tous les jours qui est exigée de nous, une résistance contre les mesquineries et petitesses, une résistance contre tous ceux qui pour une raison ou pour une autre, souhaiteront faire échouer les grandes réformes nécessaires au salut du pays. De Gaulle ne craignait pas l’adversité : « Il faut toujours avoir des adversaires pour pouvoir les combattre. Le combat, c’est la vie. On a besoin d’adversaires pour exister. [27] »

Face à l’adversité, il faut d’abord résister à la peur, cette « grande puissance » (Malraux) Face à l’adversité, l’antidote gaulliste est ensuite toujours l’espoir. « La justice sociale se fonde sur l’espoir, sur exaltation d’un pays, et non pas sur les pantoufles. » dira-t-il. Face à l’adversité, le remède est toujours l’action. « L’Histoire, pour lui, c’est l’action » (Malraux). Et face à l’adversité, il faut aussi dire la vérité aux français (« on ne peut rien fonder de durable sur le mensonge, c’est un fait troublant et certain.» Cette attitude face à l’adversité, les Libanais doivent l’adopter, eux qui ont trop souvent tendance à se laisser tétaniser par la peur, à perdre espoir, à oublier les vertus de l’action, et eux dont la classe politique a depuis si longtemps érigé le mensonge en système de gouvernement.

« Être grand, c’est épouser une grande querelle »

Arrivant dans notre « Orient compliqué », de Gaulle disait : « Je savais qu’au milieu des facteurs enchevêtrés, une partie essentielle s’y jouait. » Plusieurs décennies plus tard, une partie essentielle continue de se jouer au Levant, au milieu d’une multiplicité de facteurs plus enchevêtrés que jamais, et notamment au Liban. Le 22 novembre 1943, le Liban est devenu indépendant. Le 22 novembre est aussi le jour de l’anniversaire du général de Gaulle. Cette indépendance acquise en 1943 ne fut qu’une première étape vers une authentique indépendance qui n’adviendra que le jour où les Libanais auront édifié un État et des institutions solides, comme les y incitait le général de Gaulle dans son discours de l’USJ. Il incombe aujourd’hui aux Libanais d’être enfin des acteurs, après avoir si longtemps été de simples spectateurs de cette « partie essentielle ». Prendre en main son propre destin, c’est en cela que réside la substantifique moelle du gaullisme.

Dans l’épilogue de sa trilogie reprenant les confidences de de Gaulle, Alain Peyreffite rappelle que de Gaulle croyait en la capacité des hommes de forcer le destin. Pour Bossuet, rappelle Peyreffite, l’Histoire est écrite par la Providence, pour Michelet, elle résulte de grandes forces collectives, la bourgeoisie ou le peuple, pour Marx, elle est purement le produit de la lutte des classes. Pour de Gaulle au contraire, ce sont les hommes qui jouent un rôle déterminant. Peyreffite ne le cite pas, mais l’on songe à la phrase de Vico : « Ce sont les hommes qui font l’histoire. » De Gaulle a toujours récusé le fatalisme, le déterminisme, le laisser faire. Il incombe aujourd’hui aux Libanais de faire preuve du même volontarisme, de croire en leur destin. « Être grand, c’est épouser une grande querelle.» Le général de Gaulle avait placé cette citation de William Shakespeare en épigraphe à son livre Le Fil de l’épée. [28] Les Libanais se doivent aujourd’hui d’épouser une grande querelle, de se retrousser les manches et de construire enfin un Etat digne de ce nom. Et comme le général de Gaulle disait qu’« il y a un pacte vingt fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté des autres », si le Liban parvient un jour à accéder à une authentique souveraineté et à se libérer de toutes ses servitudes, la France elle aussi en sortira grandie.

[1] Cette phrase apparaît dans une courte nouvelle de Fitzgerald, intitulée The Crack-Up, initialement publiée dans le magazine Esquire en 1936, et qui a notamment influencé Gilles Deleuze. Elle est disponible en français dans le recueil La fêlure et autres nouvelles, Folio, Gallimard, 2014.

[2] Mais aussi Jules Verne, Walter Scott, Alexandre Dumas, Balzac, Lamartine, Vauvenargues, Vigny, le poète nordiste Albert Samain, et beaucoup d’autres. Voir à ce sujet Alain Larcan, Les passions littéraires du général de Gaulle, L’ENA hors les murs, décembre 2003. Signalons, en outre, que si les écrivains ont eu une grande influence sur de Gaulle, lui-même a fasciné les écrivains de son temps, qui ont vu en lui un personnage romanesque aussi bien qu’historique. Voir le dossier Les écrivains face à de Gaulle, Revue Espoir, Septembre 2005.

[3] Sur les tourments du général de Gaulle, voir Christine Clerc, “Tout est fichu” : les coups de blues du général, Albin Michel, 2014. Sur les épisodes dépressifs de Lincoln, voir Joshua Wolf Shenk, Lincoln’s Melancholy: How Depression Challenged a President and Fueled His Greatness, Houghton Mifflin Harcourt, 2006.

[4] Voir notamment le livre de François Broche, De Gaulle secret, Pygmalion, Gérard Watelet, 1993.

[5] Les confidences sur ce sujet sont rares, tant sont grandes la dignité et la pudeur de la famille, mais selon François Kersaudy, auteur de De Gaulle et Churchill, le général aurait même brièvement contemplé le suicide le 25 septembre 1940 à Dakar. Le résistant et ancien ministre Philippe Dechartre témoigne lui aussi avoir entendu le général lui dire : « A Dakar, lorsque, après l’échec, je me suis retrouvé sur mon bateau seul, dans la moiteur, eh bien, j’ai moi aussi, été effleuré par cette idée » (le suicide). Voir François Malye, 100 questions sur de Gaulle, Editions La Boétie, 2014.

[6] Alfred Grosser rappelle souvent un exemple parmi beaucoup d’autres de ce volontarisme. Survolant Paris en hélicoptère avec le général de Gaulle, Paul Delouvrier s’entend dire « Mettez-moi de l’ordre dans ce bordel ». Et c’est ainsi que Delouvrier, avec le soutien du général parvient à créer les « villes nouvelles » et à surmonter assez rapidement tous les obstacles administratifs.

[7] Ce mot de rebelle fut choisi par Jean Lacouture comme sous-titre du premier volume de sa remarquable biographie en 3 tomes du général de Gaulle. Jean Lacouture, De Gaulle, Le rebelle (1890-1944), Seuil, 1984.

[8] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 434, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[9] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 50, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[10] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 589, Editions de Fallois / Fayard, 1994

[12] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, p.439, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[13] Une autre remarque du général rapportée par Malraux : « Mon seul adversaire, celui de la France, n’a aucunement cessé d’être l’argent. » 45 ans avant que François Hollande ne déclare que son adversaire était « le monde de la finance », avec les suites que l’on connaît.

[14] Un exemple parmi beaucoup d’autres, celui du jeune Stéphane Hessel qui en mai 1941, rejoint le général de Gaulle à Londres et travaille au Bureau de contre-espionnage, de renseignement et d’action (BCRA) En 1944, ayant obtenu d’être envoyé en mission en France, sous le nom de code de Greco, il est arrêté par la Gestapo, déporté à Buchenwald puis transféré à Dora en 1945. Il subira la torture, le supplice de la baignoire, sera témoin des pires formes de barbarie et en sortira avec l’humanisme chevillé au corps et la volonté de ne jamais céder à la résignation. Et Hessel résistera jusqu’à son dernier souffle.

[15] Et de s’attirer aussi, au-delà des soutiens politiques… l’amour de nombreux artistes et écrivains. Comme en témoigne le petit mot écrit par Jean Cocteau sur son lit de mort : « Mon général, je vais mourir et je vous aime. »

[16] Philippe Séguin, Itinéraire dans la France d’en bas, d’en haut et d’ailleurs, Seuil, 2003, p. 598.

[17] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 50, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[18] L’amiral Philippe de Gaulle confirme dans son ouvrage d’entretiens avec Michel Tauriac, que cette phrase souvent citée est très vraisemblablement de son père. Philippe de Gaulle, De Gaulle mon père, Entretiens avec Michel Tauriac, tome 2, Plon, 2004.

[19] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 2, page 258, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[20] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 511, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[21] Confidence du conseiller diplomatique de l’Elysée René de Saint-Légier à Alain Peyreffite, cité dans le tome 3, p 212.

[22] Max Weber, Le savant et le politique, préface de Raymond Aron, 10/18, 2002.

[23] Stanley et Inge Hoffmann, De Gaulle, un artiste de la politique, Seuil, 1973. Le titre original était « The will to grandeur : de Gaulle as political artist ».

[24] Cité par Jeanine Jalkh le 7 juin 2005 dans L’Orient-Le Jour. Le journal a pudiquement évité de citer le nom de l’auteur de cette perle.

[25] François Broche, Une histoire des antigaullismes, Bartillat, 2007. Ce livre s’ouvre sur une citation attribuée à André Malraux par Alain Peyreffite : « Le gaullisme est le destin de la France. Tout ce qui est en face, ce sont des combinaisons.

[26] François Mitterrand, Le coup d’Etat permanent, Plon, 1964. Sur le parallèle entre les deux hommes, voir Alain Duhamel, De Gaulle Mitterrand La marque et la trace, Flammarion, 1991.

[27] Alain Peyreffite, C’était de Gaulle, tome 1, page 490, Editions de Fallois / Fayard, 1994.

[28] Charles de Gaulle, Le Fil de l’épée, Plon, 1932.

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