Il y a tout juste 48 ans, le 27 avril 1969, le général de Gaulle quittait le Pouvoir, fidèle à sa promesse et respectueux du peuple souverain. À minuit dix, un communiqué annonçait : « Je cesse d’exercer mes fonctions de président de la République. Cette décision prend effet aujourd’hui à midi ». Cette date anniversaire est l’occasion de revenir sur ce qui, aujourd’hui, constitue notre legs gaullien.
Notre héritage, pour quoi faire ? Aucun des onze candidats à l’élection présidentielle de cette année ne s’est privé, à un moment ou à un autre, de se référer au général de Gaulle.
On peut se féliciter de l’unanimité de cette popularité. Pourtant, faire appel à De Gaulle ne suffit pas pour laisser penser que l’on peut revendiquer son héritage sans faire la preuve des qualités qui s’y rattachent.
Le gaullisme est une pensée somme toute assez simple et accessible. Citer De Gaulle, c’est faire appel à sa stature, à son autorité morale, à sa clairvoyance.
Car derrière l’homme du 18 Juin et du sauvetage renouvelé de la République (1944, 1958, 1961…) résident des idées simples dans un monde compliqué. Tout le contraire d’une approche simpliste d’un sujet dont on ne saisit pas l’entière dimension…
D’abord les institutions. Sachant combien la France avait perdu son cap du fait de la navigation à vue du navire, le Général a construit un schéma instaurant un chef dont le pouvoir, s’il en est besoin, s’affranchit des contingences du temps présent grâce au rôle du Premier ministre et de contre-pouvoirs comme le Parlement. L’idée était de remettre les clés du système à un homme, détaché des coteries et des partis, qui puisse engager le pays vers les sommets, vers la Grandeur sans laquelle il perd le sens de son action pour se livrer à la médiocrité.
Ensuite la Défense, car tout pays doit inspirer le respect. De Gaulle l’avait senti dès la Grande Guerre. La puissance d’un pays réside dans l’adaptabilité de sa défense, sa capacité à prendre les devants, à surprendre, bref à appliquer le dicton du Cardinal de Retz : « Les lois désarmées tombent dans le mépris ». Mais pour décider des forces armées rapidement, quand l’ennemi ne les attend pas, pas encore, quand il faut cibler vite et fort, il faut un commandement réactif et rapide, justifié par une très forte légitimité. Or en démocratie, la légitimité, c’est le peuple qui la donne. Ce qui explique la nécessité de confier au chef de l’État la responsabilité suprême du commandement par le seul biais du suffrage universel.
Ajoutons à cela que se satisfaire de l’idée que le social c’est se limiter à la lutte contre le chômage, à la fixation de l’âge de la retraite ou aux heures hebdomadaires de travail me semble un peu indigent. La question sociale, c’est d’abord donner à l’individu sa totale plénitude et sa responsabilité dans son travail, susciter son engagement personnel en situant son action au sein d’un dessein dépassant le seul échelon individuel. L’Homme ne peut être réduit à l’état de souris mécanique. La Participation, c’est cela. Elle n’a jamais été, à l’heure du numérique, si indispensable…
Enfin, tout pays ne rayonne dans le monde, comme c’est le devoir de la France de le faire, que s’il est exemplaire en matière de solidarité. Faire de la coopération, en décidant conjointement avec les pays pauvres des appuis financiers et économiques, c’est être en binôme décisionnel avec les pays moins chanceux que les nôtres. La marque d’un grand pays réside dans cette capacité à dépasser les égoïsmes nationaux pour promouvoir des échanges confiants et libres.
Je souhaite à chacun et chacune des candidats à l’élection présidentielle et aux élections législatives de se référer à ces quelques principes sans se contenter de l’incantation, par nature éloignée du message que, tous, nous avons hérité du Général.
Jacques Godfrain
Président de la Fondation Charles de Gaulle
Ancien Ministre