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par Philippe Goulliaud,
Journaliste

Affiche réalisée à l’occasion du référendum du 28 octobre 1962

De Gaulle pour le Oui, le Oui pour de Gaulle

Lorsqu’elle a été adoptée par les Français le 28 septembre 1958, la Constitution de la Ve République visait à mettre un terme à l’instabilité gouvernementale et au régime des partis dans le contexte douloureux de la Guerre d’Algérie. Pour les rédacteurs de la Loi fondamentale, au premier rang desquels le ministre de la Justice Michel Debré, il ne s’agissait pas d’instaurer un régime présidentiel mais de rechercher l’équilibre des pouvoirs entre un exécutif conforté – président et gouvernement – et le Parlement.

Désormais investi de très larges prérogatives, le président de la République n’était pas, à l’origine, élu au suffrage universel direct. Charles de Gaulle, premier président de la Ve République, a été désigné le 21 décembre 1958 par un collège de grands électeurs comprenant les parlementaires mais aussi les maires, des élus municipaux et des conseillers généraux.

Très vite, la stature et la personnalité du Général consacrent la prééminence du président, clé de voûte de ces nouvelles institutions. En 1962, de Gaulle engage une révision de la Constitution afin d’y inscrire l’élection du président de la République par tous les Français au suffrage universel direct. Il décide de recourir à l’article 11 qui permet de soumettre au référendum un projet relatif à « l’organisation des pouvoirs publics ». « Rien n’est plus républicain, rien n’est plus démocratique. J’ajoute que rien n’est plus français, tant cela est clair, simple et droit », explique le président lors d’une allocution télévisée le 4 octobre 1962.

Mais le recours au référendum et le fond de cette réforme décisive qui renforce considérablement la légitimité du président de la République suscitent de vives oppositions au Parlement. Dès le lendemain du discours présidentiel, les députés adoptent une motion de censure contre le gouvernement de Georges Pompidou. La seule censure de toute l’histoire de la Ve République. En réponse, le général de Gaulle dissout l’Assemblée nationale et renomme le Premier ministre à Matignon.

Pendant la campagne référendaire, le président de la République s’engage contre le « Cartel des Non », formé, dit-il, par « les partis de jadis » accusés de vouloir « rétablir leur régime de malheur » qui avait « failli jeter la France au gouffre ». Une fois de plus, de Gaulle en appelle directement aux Français, comme l’illustre parfaitement cette affiche militante.

« Si, comme je l’espère, comme je le crois, comme j’en suis sûr, vous me répondez « Oui », une fois de plus et en masse, alors me voilà confirmé par vous toutes et par vous tous dans la charge que je porte ! Voilà le pays fixé, la République assurée et l’horizon dégagé ! Voilà le monde décidément certain du grand avenir de la France ! », lance le Général dans une allocution solennelle à la radio et à la télévision, le 18 octobre.

Son appel est entendu : le 28 octobre 1962, le « Oui » l’emporte avec 62,2 % des suffrages exprimés. C’est une large victoire pour le chef de l’État qui, en novembre, gagnera également les élections législatives.

À la présidentielle de décembre 1965, Charles de Gaulle est candidat à sa réélection. Pour la première fois au suffrage universel direct de tous les Français – à la présidentielle de 1848 qui avait vu la victoire de Louis-Napoléon Bonaparte, les femmes n’avaient pas le droit de vote. Mais, contre toute attente, le fondateur de la Ve République est mis en ballottage. Il devra attendre le second tour, le 19 décembre 1965, pour être réélu président de la République par 55,2 % des suffrages contre 44,8 % pour François Mitterrand.

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