À l’annonce du décès du président Giscard d’Estaing, nos pensées vont d’abord à sa famille à qui nous adressons nos condoléances. Sa vie politique d’une exceptionnelle longévité, prolongée par une influence durable, notamment en Europe, sa présence encore récente dans le débat public, signent un parcours singulier dans le siècle. Et son septennat, achevé il y a bientôt quarante ans, fait l’objet de régulières réévaluations au fur et à mesure que le recul de l’historien et l’ouverture des archives, prennent le pas sur les polémiques d’une période marquée par la fin des « Trente Glorieuses » et les prodromes de la mondialisation.
Sa relation avec Charles de Gaulle fut singulière. Malgré son talent, Valéry Giscard d’Estaing ne se serait pas installé à ce niveau et aussi tôt sur la scène politique, s’il était demeuré député de Chamalières, et si le fondateur de la Ve République ne l’avait pas nommé si jeune ministre des Finances, et conforté à de très nombreuses reprises dans cette fonction éminente. C’est pourquoi sa dénonciation de « l’exercice solitaire du pouvoir » – qu’il pratiqua lui-même ensuite –, puis sa décision de voter non au référendum de 1969, ont provoqué une blessure dont l’ombre portée aura des conséquences pendant des années durant. Dans ses récentes interventions, il faisait montre de son immense respect pour l’œuvre du général de Gaulle, ce qui souligne la justesse de la belle expression de Marguerite Yourcenar : « Le temps, ce grand sculpteur ».
Hervé Gaymard,
Président de la Fondation Charles de Gaulle
« Les moyens appropriés sont connus. Il n’est que de les prendre. Au printemps de 1963, j’y appelle le gouvernement. Puis, au mois d’août, constatant que les résolutions ont l’air de s’émousser, je fais brusquer et renforcer les choses. Sans doute Georges Pompidou semble-t-il moins convaincu que moi de l’importance primordiale de la stabilité du franc au point de vue national et international et tient-il par-dessus tout à ce que rien ne vienne compromettre l’expansion qui est en cours. Sans doute, Valéry Giscard d’Estaing, jeune ministre des Finances, qui certes condamne l’inflation au nom des principes de « l’Inspection », mais à qui l’exécution va incomber au premier chef, est-il assez impressionné par ce que sa tâche d’intérêt général implique de rigoureux à l’égard des intérêts particuliers. Cependant, l’un et l’autre font leurs, sans réserves, mes résolutions. Le 12 septembre 1963, le Plan de Stabilisation […] est arrêté en Conseil des ministres et aussitôt mis en application. »
Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir, tome 2, Plon, 1971.