HOMMAGE À PIERRE-GUILLAUME DE ROUX

par Olivier Germain-Thomas,
Membre de la Convention de la Fondation Charles de Gaulle

Des êtres de mission ? Ils se reconnaissent à la manière dont l’idéal qui les porte est supérieur aux intérêts immédiats. Telle a été la vie de mission de l’éditeur Pierre-Guillaume de Roux, mort à 57 ans le 11 février 2021. Fils de l’écrivain Dominique de Roux, il est né dans les livres, il a vécu et combattu pour eux jusqu’à l’épuisement.

Membre de la Convention de la Fondation Charles de Gaulle, son engagement en faveur de valeurs traditionnelles et la publication de quelques écrivains sulfureux ont fait de lui une proie facile pour ceux qui refusaient de voir la richesse et la variété des auteurs publiés sous son égide par les maisons d‘édition qu’il a animées avant de fonder en 2010 les éditions Pierre-Guillaume de Roux.

La liste est longue d’écrivains découverts ou à redécouvrir publiés avec une hautaine indifférence à l’égard des aspects commerciaux. Seuls comptaient la valeur littéraire, l’engagement ou l’authenticité. A titre d’exemples: Boris Pahor ou Michel Orcel, Linda Lê (avant sa reconnaissance) ou Gilles Lapouge, Pierre-Louis Blanc ou Robert Redeker, Philippe Barthelet ou Bertrand Lacarelle, Françoise Bonardel ou Richard Millet, Luba Jurgensen ou Ezra Pound etc, etc. Des inconnus dans la cohorte ? Justement !

Pas de vacances, toujours un manuscrit à la main ou un classique à relire. Son dégoût: la pensée caméléon de ceux dont les convictions varient au fil des modes ou des caprices de l’opinion. Il savait que le courage est la chose la moins partagée dans le milieu intellectuel. Il lui arrivait d’en rire  avec un doux mépris. Il était  habité par une foi chrétienne qui lui offrait assez de distance aux heures des replis sur soi.

Le rencontrer dans son antre de la rue de Richelieu à Paris demandait l’usage d’un coupe-coupe pour passer entre les livres et les manuscrits. Arrivait la clairière: une conversation toujours animée, engagée, élevée avec assez d’injustices qui renforçaient ses passions. Il était entré en résistance contre les abandons. Il n’en tirait pas de vanité, mais de la hauteur. Si je n’aimais pas un de ses auteurs, le combat se terminait par un éclat de rire avec la convocation de Bernanos ou de Malraux comme liens inaltérables.

Dehors, retour aux médiocrités des conventions…

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Il laisse un prodigieux catalogue qu’il est indispensable de revivifier. Quel éditeur aura l’audace de reprendre les éditions de Roux ?

La littérature, patrimoine vital.

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