L’ESPOIR D’ESPOIR

par Olivier Germain-Thomas,
Premier délégué général de l’Institut Charles de Gaulle devenu Fondation

Extrait de la revue Espoir n°40, septembre 1982

Espoir : rappel du dernier ouvrage du général de Gaulle, les Mémoires d’espoir, dont le second tome, laissé en suspens, venait de sortir ; signe d’attachement à l’inlassable quête poétique d’André Malraux qui était président de l’Institut Charles de Gaulle, mais aussi manifestation d’une volonté devant ce que nous avions à défendre.

Après la mort du général de Gaulle, nombre de bons esprits, poussés par des impératifs divers, ne cessaient de clamer qu’il avait façonné les choses d’une manière si personnelle et en fonction d’intérêts si partisans que sa disparition allait sonner le glas de son œuvre. Aujourd’hui, plus de dix ans après, la réalité s’est imposée avec une telle force que les plus hostiles en sont réduits au silence. La marque laissée par le Général est si profonde que toute notre vie politique se détermine en fonction des fondements qu’il a laissés et des directions qu’il a données. Tel homme politique s’élève-t-il un tantinet au-dessus de la mêlée ou fait-il preuve d’un peu d’audace, le voici aussitôt qualifié de « gaullien ». Cette situation est d’autant plus significative que par suite de circonstances dont l’ironie amuse les dieux du Panthéon, toutes les familles politiques qui l’avaient combattu se sont tour à tour retrouvées au pouvoir depuis son départ. C’est là un retournement qu’on oublie trop souvent et qui a eu au moins le mérite de prouver que le régime établi en 1958 n’était pas celui d’un homme mais, à travers lui, celui de la France.

L’espoir est dans cette pérennité ; il est aussi dans la certitude que les peuples puisent les forces du renouveau dans les exemples du passé. C’est même ce système continu de références à travers les siècles qui fait qu’un pays existe, qu’il a son caractère propre au milieu des autres, ce qu’on pourrait appeler une vraie culture et qui donne aux générations futures le désir de poursuivre la construction. Sinon, le sentiment d’appartenance nationale devient vite un simple système de domination. Le génie du général de Gaulle a été, pour bâtir la France du XXe siècle, de renouer avec les grandes traditions nationales de notre histoire, de dépasser leurs oppositions et d’y puiser des forces pour l’avenir. Il doit en être de même pour l’œuvre qu’il a laissée : elle est le meilleur stimulant pour empêcher la France de sombrer dans une molle médiocrité. Une des clés du message réside dans la volonté de ne jamais se laisser enfermer dans un système clos, dans un parti ou dans un intérêt particulier mais de toujours rassembler tous les éléments positifs qui se trouvent de tous les côtés pour les faire servir à l’élaboration de l’avenir.

Réfléchir sur l’œuvre du général de Gaulle – et telle est la vocation d’Espoir – est toujours une leçon de création. Toute méditation sur la manière dont les défis furent relevés en 1940 comme en 1958, ne peut que nous préparer aux ruptures qui s’annoncent et qui risquent d’être terribles pour ceux qui somnolent.

Quels que soient les clichés trop faciles sur l’histoire qui s’accélère, il reste que dix ans est très peu dans la vie d’un pays. Mais cette durée nous a suffi pour nous apporter la preuve que l’exemple gaullien restait primordial et que toute tentative pour l’illustrer était œuvre salutaire. Espoir peut donc souffler ses bougies avec sérénité mais sans jamais oublier l’appel à la créativité continue que constitue toute l’œuvre de Charles de Gaulle.

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