HOMMAGE À SONIA ELOY

En 2002, Pierre Lefranc lui rendait hommage dans Espoir, n°133

Elle nous a quittés avec la fin de l’été. C’était un être exceptionnel, une flamme qui ne vacillait pas, alimentée par beaucoup de courage et de fortes convic­tions.

Il fallait en effet du courage à la toute jeune adolescente qu’elle était pour affronter les Allemands le 11 novembre 1940 sur les Champs-Élysées, il en fallait pour quitter la sécurité de son foyer américain pour rejoin­dre la France Libre à Londres sous les bombes puis, devenue officier, pour choisir l’affecta­tion à haut risque de la liaison militaire et pour être l’une des premières femmes à débarquer en Normandie en juin 1944 puis encore, aux avant-gardes, pour pénétrer en pays ennemi et découvrir l’horreur de Buchenwald.

Le destin a récompensé ce courage en permettant sa rencontre avec le médecin militaire qui allait devenir son mari.

Mais la croisade de Sonia ne s’est pas arrê­tée avec la victoire et le jeune couple a déci­dé de servir ensemble les causes de la frater­nité humaine en accomplissant des missions d’assistance aux personnes déplacées et aux réfugiés dans les régions bouleversées par la guerre.

Courage, mais aussi une belle force de conviction. C’est en effet au service de ses idées qu’elle s’est engagée dans l’action publique derrière le général de Gaulle. Celui-ci ne s’est pas trompé en la désignant pour faire partie du Comité directeur de l’Association nationale pour le soutien de son action. En raison de ses compétences et de son dévouement, elle devait en devenir la Secrétaire générale. Ainsi elle a participé à la mise en œuvre des grandes consultations voulues par le fondateur de la Cinquième République, ainsi elle fut l’une des organisa­trices de la manifestation historique du 30 mai 1968 qui a sauvé nos institutions.

Sa fidélité à ses idées s’est prolongée au-delà du départ du Général et elle a fait partie de ceux qui, envers et contre tous, ont tenu à défendre contre les déformations et inter­prétations la pensée et l’œuvre de l’homme du 18 juin.

Dans les circonstances difficiles, son conseil se voyait sollicité et ses idées suivies. Elle fut ainsi appelée à siéger au Conseil d’ad­ministration de l’Institut Charles de Gaulle et c’est son président qui lui remit, au milieu de l’assentiment et de l’estime générale, les insi­gnes d’officier de la Légion d’Honneur qui vinrent rejoindre la Croix de Guerre et la Bronze Star Medal qu’elles avait gagné pour sa brillante conduite.

De cette vie si riche, elle nous laisse un livre à la fois grave et plein d’humour : c’est le récit des aventures d’une « Demoiselle de Gaulle » dont elle fut l’image même.

Et je ne doute pas que quelques bons gol­feurs se souviendront avec regrets de la char­mante adversaire qui les avait battus et qui n’avait pas craint d’infliger une sévère défaite au ministre des Affaires étrangères lui-même.

Nous vous apportons ici, Sonia, le salut fraternel et respectueux de vos camarades de combat de la France Libre, des fidèles de l’Association nationale, des membres de l’Institut Charles de Gaulle et de tous vos amis qui, comme vous, se sont levés pour défendre « une certaine idée de la France ».

Oui, la fidélité aux siens, à ses idées, à son pays a été le sentiment puissant qui a inspiré et animé cette âme d’élite.

Nous nous rassemblons pour adresser à son époux le docteur Philippe Eloy, à ses enfants Marina et Bernard, à ses nombreux petits-enfants et arrière-petits-enfants et à toute sa famille nos condoléances attristées et affectueuses.

La flamme qu’elle représente pour ceux qui ont eu le privilège de la connaître ne ces­sera de briller dans leurs cœurs.

X