ANNIVERSAIRE DE LA PREMIÈRE DÉCLARATION DE POLITIQUE GÉNÉRALE
D’UN PREMIER MINISTRE DE LA Ve RÉPUBLIQUE

par Jean-Marie Dedeyan
Vice-président de la Fondation Charles de Gaulle

Il y a 64 ans, Michel Debré, nommé Premier ministre par le Général de Gaulle au début du mois de janvier 1959, après l’élection présidentielle du 21 décembre 1958, prononçait, le 15 janvier 1959 à la tribune de l’Assemblée nationale, la première déclaration de politique générale d’un chef de gouvernement de la Ve République.

Précédemment Garde des Sceaux dans le gouvernement formé par le Général à sa nomination à la Présidence du Conseil, le 1er juin 1958, par le dernier Président de la IVe République, René Coty, soucieux de mettre fin à la crise politique qui se prolongeait, Michel Debré a conduit durant l’été 1958 les travaux de rédaction de la nouvelle constitution de la France, promulguée le 4 octobre.

Le discours qu’il prononce devant les députés trois mois plus tard pour présenter son programme de gouvernement est, pour la première fois, retransmis à la télévision. Le Premier ministre y évoque, notamment, l’unité nationale, la mise en place des nouvelles institutions, la rénovation du Parlement (les spécialistes de science politique ont évoqué la notion de « parlementarisme rationnalisé »), l’avenir de l’Algérie, l’Alliance atlantique, la construction européenne, la politique budgétaire, économique et sociale…

A l’issue du vote de confiance demandé par Michel Debré après l’exposé de son programme de gouvernement, sa déclaration est approuvée par une très large majorité des députés (453 voix Pour et 56 Non).

Dans son discours, Michel Debré a rappelé aux députés : « Nos personnes ne sont rien et nos institutions elles-mêmes n’ont de sens que dans la mesure où elles servent l’Etat ».

Et quelques 40 ans plus tard, au soir de sa vie, il a écrit : « Il n’y a pas de liberté, d’égalité et de fraternité sans un Etat capable de faire respecter la Loi et sans un pouvoir capable de conduire une politique répondant à l’intérêt supérieur de la Nation. Le problème de la politique, à toute époque et partout, c’est l’institution et le maintien d’un Etat qui soit un effort de justice, d’une autorité sociale qui, par son financement et son objectif, soit l’expression d’une volonté collective d’hommes égaux…, d’une autorité bâtie sur la solidarité d’un peuple… ».

Michel Debré appartient, en effet, à la longue lignée de ceux qui, depuis des siècles, construisent l’Etat et le reconstruisent lorsqu’il subit des assauts, à la lignée de ces grands serviteurs qui ont fait la France et bâti, sans jamais renoncer, sa grandeur, sa force et sa liberté.

Michel Debré, premier Premier ministre du général de Gaulle

Sa vie entière fut inspirée par un sens du service public et du bien commun reçu en héritage de son père, le grand pédiatre Robert Debré, d’origine alsacienne auquel l’Académie de médecine se prépare à rendre hommage le 10 février. Michel Debré en a légué les principes à tous ceux qui partagent aujourd’hui sa conception exigeante des valeurs de la république, de l’Etat et de la nation. Pour lui, « le problème de la politique, à toute époque et partout, c’est, l’institution et le maintien d’un Etat qui soit un effort de justice, d’une autorité sociale qui, par son financement et son objectif, soit l’expression d’une volonté collective d’hommes égaux…, d’une autorité bâtie sur la solidarité d’un peuple… ».

Pour ce fidèle du Général de Gaulle qui lui portait estime et amitié, le bien public doit reposer sur un Etat conscient de ses responsabilités, capable de fixer des objectifs, d’encourager l’élan créateur, d’assurer la défense nationale, d’éduquer et de promouvoir sa jeunesse tout en inscrivant sa gestion dans l’obligation d’assurer l’indépendance et l’avenir d’une nation vivante, soucieuse de liberté, de progrès, de sécurité et de continuité n’excluant pas la coopération européenne.

Dans ses Mémoires d’Espoir, le Général de Gaulle a rendu hommage à son premier Premier ministre en écrivant : « … Convaincu qu’il faut à la France la grandeur et que c’est par l’Etat qu’elle l’obtient ou qu’elle la perd, il s’est voué à la vie publique pour servir l’Etat et la France. S’il s’agit de cela, point d’idées qui soient étrangères à son intelligence, point d’événements qui n’éprouvent et, souvent, ne blessent son sentiment, point d’actions qui dépassent sa volonté (…).

Certain, depuis juin 1940, que de Gaulle est nécessaire à la patrie, il m’a donné son adhésion sans réserve. Jamais, quoi que puisse parfois lui coûter ma manière de voir, ne me manquera le concours résolu de sa valeur et de sa foi » [1].

En cliquant sur l’un des liens ci-dessous, on accède au texte de l’intervention de Michel Debré Premier ministre à l’Assemblée nationale ou, directement, à l’enregistrement audiovisuel de son allocution mise en ligne par l’INA. Une allocution dont les historiens soulignent encore aujourd’hui la portée.

Lien d’accès à l’allocution : https://www.vie-publique.fr/discours/180683-declaration-de-politique-generale-de-m-michel-debre-premier-ministre

    [1] Charles de Gaulle : Mémoires d’Espoir. Tome 1. Le renouveau. 1958-1962

    Gouvernement Debré (8 janvier 1959 – 14 avril 1962)

     Nomination du Premier ministre et des membres du Gouvernement : J.O. du 9 janvier 1959.

    Affectation des secrétaires d’État : J.O. du 21 janvier 1959.

    Modifications au sein du Gouvernement : J.O. des 21, 29 et 30 mai 1959, 24 et 28 juillet 1959, 25 décembre 1959, 14 et 20 janvier 1960, 6 février 1960, 23 novembre 1960, 20 février 1961, 9 et 19 mai 1961, 25 août 1961, 19 janvier 1962.

    Démission du Gouvernement : J.O. du 16 avril 1962.

    Premier ministre Michel Debré
    Ministres conseillers
    (du 23 juillet 1959 – au 19 mai 1961)
    Félix Houphouët-Boigny
    Philibert Tsiranana
    Gabriel Lisette
    Léopold Sédar Senghor
    Ministre délégué auprès du Premier ministre Jacques Soustelle (chargé du Sahara, des TOM, DOM et de l’Energie atomique le 13 février 1959)
    (jusqu’au 5 février 1960)
    Ministre délégué auprès du Premier ministre Roger Frey
    (du 5 février 1960 au 6 mai 1961)
    Ministre délégué auprès du Premier ministre Louis Terrenoire
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre délégué auprès du Premier ministre (énergie atomique) Pierre Guillaumat
    (à compter du 5 février 1960)
    (chargé de la fonction publique le 19 mars 1960)
    Secrétaire d’État auprès du Premier ministre Pierre Chatenet
    (jusqu’au 28 mai 1959)
    Secrétaire d’État auprès du Premier ministre Nafissa Sid Cara
    Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la fonction publique Louis Joxe
    (du 24 juillet 1959 au 15 janvier 1960)
    Ministre d’État Félix Houphouët-Boigny
    (jusqu’au 20 mai 1959)
    Ministre d’État Louis Jacquinot
    (puis ministre d’État, chargé du Sahara, des TOM et DOM, à partir du 24 août 1961)
    Ministre d’État Robert Lecourt (chargé de la coopération du 27 mars 1959 au 5 février 1960, puis du Sahara, des TOM et DOM du 5 février 1960 au 24 août 1961)
    Secrétaire d’État, chargé du Sahara, des DOM et TOM Jean de Broglie
    (à compter du 24 août 1961)
    Secrétaire d’État chargé des relations avec les États de la Communauté Jean Foyer
    (du 5 février 1960 au 18 mai 1961)
    Ministre d’État André Malraux
    (puis ministre d’État, chargé des affaires culturelles, à partir du 22 juillet 1959)
    Ministre d’État, chargé des affaires algériennes Louis Joxe
    (à compter du 22 novembre 1960)
    Garde des sceaux, ministre de la justice Edmond Michelet
    (jusqu’au 24 août 1961)
    Bernard Chenot
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre des affaires étrangères Maurice Couve de Murville
    Secrétaire d’État aux affaires étrangères Georges Gorse
    (à compter du 18 mai 1961)
    Ministre de l’intérieur Jean Berthouin
    (jusqu’au 27 mai 1959)
    Pierre Chatenet
    (du 28 mai 1959 au 6 mai 1961)
    Roger Frey
    (à compter du 6 mai 1961)
    Secrétaire d’État à l’intérieur Michel Maurice-Bokanowski
    (jusqu’au 5 février 1960)
    Secrétaire d’État aux rapatriés Robert Boulin
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre des armées Pierre Guillaumat
    (du 8 janvier 1959 au 5 février 1960)
    Ministre des finances et des affaires économiques Antoine Pinay
    (jusqu’au 13 janvier 1960)
    Wilfrid Baumgartner
    (du 13 janvier 1960 au 18 janvier 1962)
    Valéry Giscard d’Estaing
    (à compter du 18 janvier 1962)
    Secrétaire d’État aux finances Valéry Giscard d’Estaing
    (jusqu’au 18 janvier 1962)
    Secrétaire d’État aux affaires économiques Max Fléchet
    (puis secrétaire d’État aux affaires économiques extérieures, à compter du 17 novembre 1959),
    (jusqu’au 19 janvier 1960)
    Ministre de l’éducation nationale André Boulloche
    (jusqu’au 23 décembre 1959)
    Louis Joxe
    (du 15 janvier 1960 au 22 novembre 1960)
    Pierre Guillaumat
    (par intérim, du 22 novembre 1960 au 20 février 1961)
    Lucien Paye
    (à compter du 20 février 1961)
    Ministre des travaux publics et des transports Robert Buron
    Ministre de l’industrie et du commerce Jean-Marcel Jeanneney
    Secrétaire d’État à l’industrie et au commerce Joseph Fontanet
    (jusqu’au 17 novembre 1959)
    Ministre de l’agriculture Roger Houdet
    (jusqu’au 27 mai 1959)
    Henri Rochereau
    (du 28 mai 1959 au 24 août 1961)
    Edgard Pisani
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre du travail Paul Bacon
    Ministre de la santé publique et de la population Bernard Chenot
    (jusqu’au 24 août 1961)
    Joseph Fontanet
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre de la construction Pierre Sudreau
    Ministre des anciens combattants Raymond Triboulet
    Ministre des postes et télécommunications Bernard Cornut-Gentille
    (jusqu’au 5 février 1960)
    Michel Maurice-Bokanowski
    (à compter du 5 février 1960)
    Ministre de l’information Roger Frey
    (jusqu’au 5 février 1960)
    Louis Terrenoire
    (du 5 février 1960 au 24 août 1961)
    Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de l’information Christian de la Malène
    (à compter du 24 août 1961)
    Ministre de la coopération Jean Foyer
    (à compter du 18 mai 1961)
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