« RESSENTI OU RÉEL ? »
par Jacques Godfrain
Président d’honneur de la Fondation Charles de Gaulle
Depuis quelques années, la météo nationale, sur les chaînes d’information, annonce la température, en valeur ressentie ou réelle.
Il y a une quinzaine de jours, le nombre de commerces incendiés et de voitures brûlées donne un ressenti terrifiant, au point que la France était devenue un pays à éviter pour les touristes du monde entier.
A qui mieux mieux, les titres des journaux, les présentations des informations télévisées ou parlées, sans évoquer les fameux réseaux sociaux, n’avaient qu’un mot à la plume ou à la bouche : « les jeunes émeutiers », « la jeunesse en révolte » et « la guerre civile entre les générations ».
Ayant eu l’occasion de parler personnellement avec les victimes de tels actes, le dénominateur commun de leurs propos était qu’une poignée de 5 ou 10 personnes avait incendié ici ou là les biens d’autrui, en ruinant beaucoup d’entre eux.
La jeunesse était montrée du doigt, accusée sans aucune distinction, d’avoir obtenu le titre d’émeutier.
Or, ces accusations ne correspondaient pas aux échanges que j’avais eus avec beaucoup de jeunes et j’ai voulu en savoir plus en me penchant sur des chiffres réels de l’engagement bénévole des jeunes depuis 2016 jusqu’en septembre 2022. Ces chiffres ont très fortement augmenté, en progression de 16% ou plus en 5 ans !
Pendant la même période, 21% des 18-30 ans se déclarent donner de leur temps à un moment de la semaine à des causes utiles à la collectivité.
L’Agence du Service Civique note qu’en 2022 il y a eu 144 000 jeunes engagés, soit le 2e meilleur niveau depuis la création de l’Agence en 2010 et 63 000 de plus qu’en 2016.
A l’international, France Volontaires International a noté que 5 316 volontaires se sont engagés en 2021, soit une progression de 43% par rapport à 2020.
Parmi eux, 1 630 volontaires ont souhaité accomplir une mission de solidarité internationale, soit une hausse de 13% entre 2021 et 2022.
Pour mieux illustrer ce tableau, les scouts et guides de France comptaient en 2022 66 190 jeunes de 6 à 21 ans dans leurs rangs, soit 3 500 de plus qu’en 2021, auxquels il faut ajouter les 30 498 adultes bénévoles.
Dès lors, à la jeunesse qui brûle et qui casse, il faut substituer l’idée qu’une autre jeunesse, beaucoup plus nombreuse, veut aider bénévolement à la solidarité et à l’entraide.
Le ressenti est donc contraire à la réalité, et il serait bon, qu’à l’occasion, la voix des médias s’intéresse à ces signes forts d’une jeunesse qui veut être utile.
Très récemment, une toute jeune fille, volontaire du Service National Universel, m’affirmait que pendant son stage dans un village du Sud Aveyron elle s’était, pour la première fois de sa vie, sentie utile à quelque chose !
C’est plutôt cela qui manque à quelques incendiaires !