De Gaulle et l’Afrique (8)

De la Communauté aux indépendances

La politique africaine que conduit le général de Gaulle après son retour au pouvoir le 1er juin 1958 s’inscrit  dans la continuité de la loi-cadre de 1956. Elaborée sous l’autorité de Gaston Defferre, celle-ci définit un régime d’autonomie interne pour l’Afrique noire. Les territoires élisent des assemblées au suffrage universel, cependant que des Conseils de gouvernement incarnent l’exécutif. Ces dispositions sont considérées comme une étape importante sur la voie de l’indépendance par le Rassemblement démocratique africain (RDA) de Félix Houphouët-Boigny et Modibo Keita.

Mais deux ans après le vote de la loi-cadre, de Gaulle fait face aux interrogations de plus en plus pressantes des nouvelles élites africaines. Il redoute la sécession de ces territoires, synonyme selon lui d’un affaiblissement de la France dans le monde, mais est conscient que la décolonisation représente un mouvement historique mondial. C’est pourquoi il propose aux Africains le principe de la libre détermination. Les populations auront le choix entre l’indépendance immédiate -sans aide de la France- et l’intégration dans la Communauté.

La nouvelle Constitution, dont la rédaction revient notamment à un groupe de travail dirigé par Michel Debré et auquel participe le jeune juriste Jean Foyer, doit en effet instituer une Communauté entre la République française et les Territoires d’Outre-mer qui souhaitent lui rester librement liés.

C’est pour demander aux peuples de ces territoires d’adhérer à son projet que de Gaulle décide de se rendre en Afrique en août 1958. Le voyage est organisé par le ministre Bernard Cornut-Gentille et par Jacques Foccart. Il commence par une brève escale à Fort-Lamy, au Tchad, le 21 août 1958.

C’est ensuite Tananarive, Brazzaville, Abidjan, Conakry et enfin Dakar. L’étape guinéenne est la seule qui se passe mal, Ahmed Sékou Touré y prononçant un discours très violent devant l’Assemblée territoriale, en présence de De Gaulle. Le 28 septembre 1958, onze colonies d’Afrique noire (plus Madagascar) approuvent la nouvelle Constitution et intègrent la Communauté. Seule la Guinée vote « non » et accède immédiatement à l’indépendance, sans accord de coopération avec Paris.

La Constitution de la Ve République dispose que la Communauté « est fondée sur l’égalité et la solidarité des peuples qui la composent ». Régie par le titre XII de la loi fondamentale, la Communauté est forme politico-juridique hybride. Elle est présidée par le général de Gaulle. Le pouvoir exécutif y est détenu par un Conseil composé du Premier ministre et des chefs de gouvernement des États membres. Mais la France conserve l’essentiel des prérogatives en matière de défense, de politique étrangère et monétaire ou de commerce extérieur…

Vers l’indépendance

L’article 86 de la Constitution de la Ve République précise qu’ « un Etat membre de la Communauté peut devenir indépendant ». Très vite, les dirigeants africains souhaitent que leurs pays saisissent cette opportunité d’accéder à l’indépendance pleine et entière, sans rupture des liens de solidarité avec la France. Ainsi, dès le printemps 1959, le Sénégal et le Soudan français unis en une Fédération du Mali réclament-ils solennellement un transfert des compétences devant déboucher sur une indépendance

Il importe dès lors de réfléchir à de nouveaux rapports institutionnels entre la France et ses anciennes colonies d’Afrique noire. La loi constitutionnelle du 4 juin 1960 entend répondre à cette nécessité. Sans abroger les textes existants, elle permet à un Etat devenu indépendant de

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